Vous trouverez ici les réponses à toutes les questions posées lors de notre deuxième évènement interactif en direct sur le thème «Garantir la production».
1. Dans les conditions actuelles, certaines livraisons ne sont plus rentables pour moi. Puis-je invoquer la force majeure et ne pas effectuer ces livraisons, résiliant par conséquent le contrat?
Il s’agit d’un aspect particulier de la force majeure appelé «clausula rebus sic stantibus». Cette clause sous-entend que les dispositions d’un contrat ne restent applicables que si les circonstances essentielles qui ont justifié la conclusion de ce contrat demeurent en l’état. Si un juge est appelé à intervenir, il pourra réduire (voire supprimer) les prestations ou heures de travail convenues. Avant de recourir à la justice, il vaut toutefois mieux chercher le dialogue et attirer l’attention sur cette clause.
2. Divers fournisseurs ont durci leurs conditions de paiement et ne livrent parfois plus que sur avance de paiement. Que peut-on faire?
Il est capital de respecter les délais de paiement. Dès que quelqu’un ne s’y tient pas, il lance une réaction en chaîne. L’insécurité prend alors le dessus, des renseignements sur la solvabilité sont exigés et cela vire à la catastrophe. Si chacun exige un paiement à l’avance, le système ne fonctionne plus. Pour que le système continue à fonctionner, il est impératif que chacun respecte les délais de paiement et exige la même rigueur de ses fournisseurs et clients.
3. Actuellement, de nouveaux contrats sont conclus avec les clients. Quelle attention convient-il d’apporter aux thèmes du renchérissement, de la disponibilité des matériaux de base, du calendrier, etc.
Ce sont des aspects auxquels il faut veiller lors de toute conclusion de contrat. La clause de la «force majeure» donnera certainement beaucoup de fil à retordre aux juristes. Mais l’important est avant tout de bien réfléchir aux conditions de livraison que vous pouvez garantir ou exiger. Le renchérissement ne devrait pas être d’actualité.
4. Mon client invoque la force majeure pour ne pas payer. En a-t-il le droit?
Non, en principe il n’en a pas le droit. Le système bancaire fonctionne bien, les banques sont ouvertes et les transactions, qu’elles soient électroniques ou physiques, sont possibles. Cela risquerait par ailleurs de bloquer les chaînes de livraison et de paiement, alors que les banques sont ouvertes et en état de fonctionnement.
5. J’ai entendu que les amortissements pouvaient être suspendus. Est-ce aussi le cas pour les taux de leasing?
Oui, cela concerne également les taux de leasing. La suspension n’est pas automatique, mais peut être étudiée selon le cas. Il est possible de différer jusqu’à trois taux de leasing. Selon les cas, il se peut que des taxes soient perçues. Auprès des Banques Raiffeisen cela devrait être possible pendant trois mois, ceci dans le cadre de la situation exceptionnelle liée au coronavirus.
6. Selon vous, que faut-il aux entreprises pour sortir renforcées de la crise?
Dans l’immédiat, il leur faut suffisamment de liquidités pour pouvoir, à moyen et long terme, placer les bons jalons opérationnels et stratégiques. On l’entend souvent, mais une crise offre toujours des opportunités. Aujourd’hui, il faut une forte stabilité émotionnelle, beaucoup d’endurance et une bonne dose d’optimisme. Les entrepreneures et entrepreneurs suisses sont résistants, ensemble nous y parviendront!
7. Qui assume les dommages consécutifs à des retards ou annulations de livraison de la part de mes fournisseurs?
Si, dans le cadre d’un contrat, un dommage est causé par l’autre partie, cette dernière doit fournir des dommages et intérêts. Dans les contrats, il y a des clauses qui règlent le paiement de dommages et intérêts même en l’absence de responsabilité (comme dans le cas du coronavirus). Lisez les contrats attentivement. Il faut aussi tenir compte du fait que de nombreuses PME suisses sont actives à l’international et ne sont donc pas seulement soumises au droit suisse.
8. En temps de crise aiguë, est-ce vraiment le bon moment de repenser et d’ajuster son modèle commercial, ses processus, etc.?
C’est le moment idéal. Quand, si ce n’est maintenant, réévaluer en profondeur son modèle commercial? Les entreprises qui se sont bien préparées au cours des dernières années, et qui ont par exemple automatisé ou numérisé leurs processus, sont maintenant avantagées. Il n’y a jamais rien d’illogique à s’interroger sur la manière et les secteurs dans lesquels faire des profits. Cela passe également par une réflexion sur l’innovation: en quoi votre offre est-elle unique? Quelles transformations la crise provoque-t-elle? Comment (continuer de) vous distinguer après le retour à la normale avec vos prestations, services, canaux. etc.?
9. Avez-vous de bons conseils à donner en matière de communication interne relative au chômage partiel?
La réduction de l’horaire de travail dépend de la situation, ce qui rend la communication difficile. Cet instrument pouvant être mis en place dans un délai très court, il importe d’expliquer son fonctionnement et son utilité aux collaborateurs. Ceux-ci doivent en outre comprendre que l’employeur décide de qui travaille et à quel taux. Une information régulière à ce sujet s’avère donc primordiale. Il est d’ailleurs tout à fait possible de communiquer de manière positive, car la réduction du temps de travail peut finalement être une chance pour beaucoup.
10. L’employeur peut-il demander à ses employés de prendre des congés sans solde (sur la base du volontariat)?
On ne peut pas vraiment parler de volontariat lorsqu’il s’agit d’une demande de l’employeur. Si cette option existe bel et bien, elle n’est pas applicable, et donc légale, en période de coronavirus. Une démarche basée sur un véritable volontariat reste toutefois envisageable, mais elle devrait plutôt concerner la réduction de l’horaire de travail ou la prise de congés payés.
11. Comment maintenir le dynamisme et la proximité de nos relations clientèle? Et que pouvons-nous faire pour reprendre la production et la «routine habituelle» de la manière la plus fluide possible après la crise et la période de chômage partiel?
Il est recommandé de maintenir un contact étroit avec ses clients et fournisseurs malgré la crise, même si l’entreprise devait être amenée à fermer temporairement ou à mettre en place une réduction de l’horaire de travail. Cela commence par une communication de crise et se poursuit par l’élaboration de différents scénarios: comment évolue la chaîne de livraison? Quels sont les nouveaux clients? Et ceux qui disparaissent? Il existe par exemple des entreprises qui augmentent actuellement leur production en misant sur une reprise à l’automne.
12. Pourquoi les autres banques ne mettent-elles pas en place de réseaux comme Raiffeisen et le RCE? C’est très important! La Suisse est trop petite pour que chacun fasse bande à part.
Le RCE considère ses relations avec les associations du commerce et de l’industrie comme une situation gagnant-gagnant. Chacun peut ainsi s’entraider et échanger sur différents sujets, ce qui aide particulièrement les entrepreneurs actuellement.
13. Pourquoi les médias ne disent-ils pas suffisamment que le secteur économique veut TRAVAILLER?
Nous sommes aussi étonnés que ce sujet ne soit que très peu évoqué. Nous observons aussi que le secteur économique souhaite travailler, dans le respect de toutes les mesures de prévention bien entendu. Dans ces conditions, il est tout à fait possible de travailler sans prendre de grands risques.
14. Il faut veiller à ce que nous continuions à nous préoccuper de développement et d’innovation. Pouvez-vous relayer le fait que tous ces employés ne devraient pas être mis au chômage partiel et payés par la Confédération à fonds perdus?
Nous transmettrons volontiers ce message.
15. Je construis des machines en Suisse centrale. Mes fournisseurs en Tchéquie, dont je dépends pour des pièces importantes, ont fermé. Que puis-je faire?
Cela dépend de l’importance de ces pièces et si vous pratiquez ou non le «dual sourcing», qui offre une possibilité de repli. Avoir différents fournisseurs pour les pièces critiques est devenu crucial de nos jours. La question du prix s’efface ainsi derrière la sécurité de l’approvisionnement.
16. Certains logisticiens et entreprises de transport ont massivement augmenté leurs prix.
C’est tout à fait vrai. Les prix du fret aérien se sont particulièrement envolés en raison de capacités limitées. De nombreuses entreprises du secteur aérien ont en effet dû recourir à une réduction de l’horaire de travail ou arrêter complètement leur activité. La liberté de mouvement est en outre restreinte dans de nombreux pays, ce qui contribue également à faire flamber le prix des transports. On peut toutefois constater que la situation s’est améliorée au cours des derniers jours dans de nombreux pays asiatiques et que l’économie y reprend son cours normal.
17. En parlant d’innovations: Innosuisse continue-t-elle d’apporter son soutien en temps de crise? On n’entend pas parler d’eux!
Innosuisse est l’agence fédérale de promotion de l’innovation. Elle existe toujours et ses programmes, que je vous recommande, continuent de tourner. Innosuisse dispose de différents instruments de promotion et les utilise pour soutenir des projets novateurs. Au RCE, nous accompagnons les entreprises qui s’y intéressent pour l’inscription, la demande de fonds ou encore la mise en œuvre de projets concrets.
18. Innosuisse pourrait au moins agir de manière proactive via les associations au moyen des chèques d’innovation...
C’est une idée intéressante. Les projets soutenus par Innosuisse doivent normalement comporter une entreprise et un partenaire de mise en œuvre ou de recherche (institut d’une haute école spécialisée p. ex.). Innosuisse ne verse alors pas directement d’argent à l’entreprise mais paie, pour les projets acceptés, les coûts salariaux et, dans certaines conditions, les frais matériels du partenaire de recherche, ainsi qu’une éventuelle contribution aux coûts de recherche indirects (overhead). L’entreprise doit mettre au moins autant de moyens à disposition (sous forme de force de travail ou de fonds) et supporte elle-même ses frais de projet.
19. Puis-je appeler le RCE pour étudier ma situation personnelle? Et si oui, est-ce payant?
Vous pouvez volontiers nous appeler. Notre mission première consiste à soutenir les entreprises, et en particulier les PME, de toute la Suisse. Depuis sa création, le RCE offre un Entretien Entrepreneur gratuit de deux heures, qui peut maintenant aussi être effectué en ligne. Nous utilisons depuis toujours des outils tels que Microsoft Teams, Skype for Business, etc.
20. Quelle est la situation actuelle chez Raiffeisen pour les crédits transitoires?
Le Conseil fédéral a communiqué le nombre de crédits transitoires déjà attribués. La banque Raiffeisen St-Gall a reçu environ 100 demandes d’un montant total d’environ 8 millions de francs, pour des crédits de 100 000 francs et plus. La Banque Raiffeisen St-Gall se situe ainsi dans la moyenne suisse. La grande majorité a pu être attribuée dans un court délai de 15 à 20 minutes et être versée sur les différents comptes courants.
21. Peut-on utiliser le crédit transitoire pour financier une innovation?
En principe, ces crédits visent à garantir les liquidités de manière simple et rapide. Les nouveaux investissements ne sont donc pas autorisés, mais il existe une marge de manœuvre pour les investissements de remplacement dans certains cas exceptionnels.